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PENTECÔTE XI | Propre 13

4 août 2024

2 Samuel 11:26-12:13a ; Ephesiens 4:1-16 ; Jean 6:24-35

Depuis la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympique à Paris vendredi dernier (grand moment de communion mondiale autour du sport !), les médias et les réseaux sociaux ont été le champ de bataille de nombreuses polémiques. La cause de ces haros est une des performances artistiques qui scandait la cérémonie. Certains y ont vu une allusion à la Sainte Cène, le dernier repas du Christ avec ses disciples célébré pendant la messe. Même si le metteur en scène et les artistes concernés ont expliqué depuis que l’intention n’était pas de représenter la Sainte Cène mais le banquet des dieux sur le Mont Olympe, une question demeure pourtant : qui est en mesure de légitimement représenter ou de définir ce qu’est ce mystère que nous célébrons ? Malheureusement cette polémique n’a pas commencé avec le JO : les chrétiens se déchirent là-dessus depuis toujours. Au XVIe siècles, les Protestants et les Catholiques s’accusaient mutuellement de faire du repas du Seigneur un blasphème à cause des manières différentes dont ils le concevaient et le célébraient. Encore aujourd’hui, la majorité des églises chrétiennes ne reconnaissent pas la validité des communions d’autres églises. Pour la majorité des églises orthodoxes par exemples, la communion que nous partageons ici, ou que partagent les catholiques, n’est pas vraiment la sainte communion et elles défendent à leurs fidèles d’y participer. Que dans certaines églises, comme la notre, la messe puisse être célébré par des femmes fait aussi dire à certains qu’il s’agit d’une parodie…

Ce que ces polémiques révèlent au fond, c’est sans doute notre compréhension fort mondaine de ce qu’est la communion. Nous en faisons un pré-carré religieux, des règles et des normes alors qu’il s’agit plutôt d’une attitude, d’un esprit, d’une manière d’être incorporé au corps du Christ et aux autres. Comme tous les mots latins qui finissent en -tio, par exemple attention, relation, fermentation, ou relaxation, la communion est une action, un processus, ce n’est pas un état ou un fait. Ce n’est pas un évènement statique, qui peut être définit, circonscrit ou contrôlé. Dans sa lettre aux Ephésiens, Paul explore justement toute la profondeur, la hauteur, la largeur et la longueur de la communion qu’aucun des disciples du Christ ne peut définir seul mais qui pourtant comprend tout. En s’adressant aux disciples d’Ephèse, l’apôtre insiste sur ceux choses. D’abord que la source vivante de notre communion c’est le Christ lui-même dans lequel nous sommes incorporés, d’abord parce que nous sommes créés par Dieu et que c’est par Christ que tout a été créé, ensuite parce que pouvons être baptisés dans sa mort et sa résurrection. « Il y a un seul corps et un seul Esprit, de même qu’il y a une seule espérance à laquelle Dieu vous a appelés, » nous dit Paul, « Il y a un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême ; il y a un seul Dieu, le Père de tous, qui règne sur tous, agit par tous et demeure en tous. » Ce passage de la lettre aux Ephésiens est d’ailleurs au cœur du rite du baptême, ce rite de l’Eglise qui est un signe visible de notre incorporation dans le Christ. La seconde chose sur laquelle Paul insiste c’est que pour entrer dans cette dynamique, ce processus de communion dans lequel nous sommes toujours-déjà, il faut vivre comme le Christ, lui qui est « descendu dans les régions les plus profondes de la terre » et « monté au plus haut des cieux » afin de « remplir tout l’univers ». Comment faire cela ? comment entrer dans cette dynamique si extraordinaire, si extrême, si coûteuse ? « Soyez toujours humbles, doux et patients. » Nous dit Paul, « Supportez-vous les uns les autres avec amour. Efforcez-vous de maintenir l’unité que donne l’Esprit saint par la paix qui vous lie les uns aux autres. » Voilà un mode de vie si extrême et en tout point différent de celui de celles et ceux qui s’engagent dans des polémiques stériles ou des conflits plus ou moins sanglants ! En vivant de cette façon, comme le Christ vit, nous devenons les membres utiles de son corps. Avec lui, nous pouvons participer à embrasser et recueillir tout ce que Dieu a créé.

Aucun de nous n’est seul capable de mettre des limites à la communion, car c’est Jésus même qui nous fait entrer en elle, qui se donne à nous et nous fait croître en elle, en nous nourrissant lui qui est le pain de vie. Sur terre, malgré tant de tentatives, aucune église, aucune autorité, aucune idéologie séculière ou religieuse, n’en détient les droits ou ne peut la définir. En fait, on ne peut pas plus définir les limites de la communion, de qui est in et qui est out, qu’on ne peut connaître les limites du monde : l’amour, la miséricorde de Dieu dépasse tout ce que nous pouvons définir. Nul n’est trop indigne, nul n’est trop inhumain pour y entrer. Il est intéressant d’entendre d’ailleurs, que parmi les différents dons que décrits Paul, « apôtres, les prophètes, les évangélistes, les pasteurs et les enseignants », on ne compte pas celui de censeur ou de théologien, de personnes qui pourraient dire, détachés des relations humaines de la vie d’une communauté toujours en croissance, ce qui forme le corps du Christ. C’est sans doute car un censeur finalement ne construit pas, il définit, il compartementalise, il exclut. Il parle de ce qui est déjà, pas de ce qui doit venir, de ce qui croit et grandit grâce à l’Esprit de Dieu. Nous, nous sommes appelés à entrer dans cette dynamique de vie, de communion, celle qui nous coûte car oui ce n’est pas facile d’être humbles, doux, patients. Ce n’est pas facile de grandir avec les autres, tous les autres, humains ou non-humains. Ce n’est pas facile de ne pas nous offenser, de faire attention aux autres ou de prendre le temps de considérer les choses de différents points de vue. Ce n’est pas facile d’accepter que le monde, nos sociétés, notre église grandisse et devienne quelque chose qui nous surprend. Mais c’est comme cela que vit le Christ.  

Ce qui nous unit ce n’est pas notre nationalité, notre liturgie, notre langue, nos croyances quant à ce qu’il se passe dans ce mystère. Ce qui fait notre communion ce ne sont pas les règles et identités de ce monde, séculières ou religieuses. Ce qui forme notre union et notre communion c’est que nous « croyons » en celui que le Père « a envoyé », le Christ lui-même, lui qui nous fait grandir en un seul peuple vivant à jamais. « Croyons » est peut-être finalement un autre de ces mots en -ion, de ces dynamiques coûteuses par lesquelles nous vivons plus grandement, et par laquelle nous pouvons le recevoir, lui, « le pain de vie », le terme à nos faims et nos soifs anxieuses. 

Comme les gens qui partent à la recherche de Jésus après avoir été nourri par lui au désert, la communion nous lance dans une quête pour une vie plus pleine. Mais pour cette quête nous avons des provisions : c’est Jésus lui-même qui s’est déjà donné à nous et nous ravitaille à chaque fois que nous venons à lui en prière, à chaque fois que nous le recevons.   Joris  B.

PENTECOST XI | Proper 13

August, 4th 2024     2 Samuel 11:26-12:13a ; Ephesians 4:1-16 ; John 6:24-35

Since the opening ceremony of the Olympic Games in Paris last Friday (a great moment of worldwide communion around sport!), the media and social networks have been the battleground of numerous polemics. The cause of this hullabaloo was one of the artistic performances that punctuated the ceremony. Some saw it as an allusion to the Last Supper;  Christ’s last meal with his disciples celebrated during mass. Although the director and artists involved have since explained that the intention was not to represent the Last Supper, but the banquet of the gods on Mount Olympus, the question remains: who can legitimately represent or define the mystery we are celebrating? Unfortunately, this controversy didn’t start with the Olympics: Christians have been arguing about it since time immemorial. In the 16th century, Protestants and Catholics accused each other of making the Lord’s Supper a blasphemy because of the different ways in which they conceived and celebrated it. Even today, the majority of Christian churches do not recognize the validity of the communions of other churches. For the majority of Orthodox churches, for example, the communion we share here, or that Catholics share, is not really Holy Communion, and they forbid their faithful to participate in it. The fact that in some churches, such as ours, mass can be celebrated by women also makes some people say that it’s a parody…


What these controversies really reveal is our very worldly understanding of communion. We see it as our own little religious corner, with rules and norms, when it’s actually an attitude, a spirit, a way of being incorporated into the body of Christ and into others. Like all Latin words ending in -tio, such as attention, relation, fermentation or relaxation, communion is an action, a process, not a status or a fact. It is not a static event that can be defined, circumscribed or controlled. In his letter to the Ephesians, Paul explores the full depth, height, breadth and length of communion, which none of Christ’s disciples can define on their own, yet which includes all creatures and all creation. In addressing the disciples of Ephesus, the apostle insists on two things. Firstly, that the living source of our communion is Christ himself, in whom we are incorporated –  firstly because we are created by God and it is through Christ that everything was created –  and secondly because we can be baptized into his death and resurrection. “There is one body and one Spirit, just as there is one hope to which God has called you,” Paul tells us, “There is one Lord, one faith, one baptism; there is one God, the Father of all, who reigns over all, works through all and dwells in all.” Moreover, this passage from the letter to the Ephesians is at the heart of the rite of baptism; that rite of the Church which is a visible sign of our incorporation into Christ. The second thing Paul insists on is this. To enter into this dynamic, this process of communion in which we are always-already involved, we must live like Christ, who “descended into the deepest parts of the earth” and “ascended into the highest heaven” in order to “fill the whole universe”. How do we do this? How do we enter into this dynamic that is so extraordinary, so extreme, so costly? “Always be humble, gentle and patient.” Paul tells us, “Support one another with love. Strive to maintain the unity given by the Holy Spirit through the peace that binds you to one another.” This is such an extreme way of living, and so different in every way from that of those who engage in sterile polemics or more or less bloody conflicts! By living in this way; by living as Christ lives, we become useful members of his body. With him, we can participate in embracing and gathering everything and everyone that God has created.
None of us alone is capable of setting limits to communion, for it is Jesus himself who brings us into it, who gives himself to us and makes us grow in it, feeding us he who is the bread of life. On earth, despite numberless attempts, no church, no authority, no secular or religious ideology, holds the rights to it or can define it. In fact, we can no more define the limits of communion; of who is in and who is out, than we can know the limits of creation. God’s love and mercy surpasses anything we can define. No one is too unworthy, no one too inhuman, to enter into it. It’s also interesting to hear that among the various gifts described by Paul, “apostles, prophets, evangelists, pastors and teachers”, we don’t hear anything about a censor or theologian detached from human relationships in the life of an ever-growing community who could define what makes the body of Christ. When all is said and done this is undoubtedly because a censor does not construct. A censor defines, compartmentalizes and excludes. He speaks of what already is, not of what is to come, of what grows thanks to God’s Spirit. We are called to enter into this dynamic of life, of communion. It costs us, because yes, it’s not easy to be humble, gentle, patient. It’s not easy to grow with others; all others, human or non-human. It’s not easy not to take offense, to pay attention to others or to take the time to consider things from different points of view. It’s not easy to accept that the world, our societies, our church grows and becomes something that surprises us. But that’s how Christ lives.

What unites us is not our nationality, our liturgy, our language, our beliefs about what happens in this mystery. It is not the secular or religious rules and identities of this world that make us one. Our union and communion is formed by the fact that we “believe” (nous croyons) in the one whom the Father “has sent”, Christ himself, who makes us grow into a single people living forever. “Believe” (“Croyons”) is perhaps ultimately another of those -ions words, those costly dynamics by which we live more greatly, and by which we can receive him, “the bread of life”, who brings an end to our anxious hungers and thirsts.

Like the people who set out in search of Jesus after being fed by him in the desert, communion launches us on a quest for greater life. But for this quest we have provisions or the journey: it’s Jesus himself who has already given himself to us, and nourishes us every time we come to him in prayer, every time we receive him.