Avec une liste de ceux qui sont toujours à bord desdites Galères.

LONDRES, Printed for Richard Parker at the Ʋnicorn under the Royal Exchange, and Sold by A. Baldwin near the Oxford Arms in Warwick-lane, 1699.

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Ce n’est pas par vanité que j’ai été amené à publier le récit qui va suivre de mes souffrances alors que j’étais à bord des galères du roi de France et dans les cachots de Marseille ; mais le Seigneur par son infinie miséricorde m’ayant sauvé de mes tourments, m’ayant tiré des ténèbres, et brisé mes chaînes, quelques personnes pieuses ont pensé que je serais ingrat si je ne louais pas le Seigneur pour sa bonté en publiant aux enfants des hommes ses œuvres merveilleuses.

J’ai quitté le royaume de France à cause de ma religion en l’an 1679, étant alors âgé d’environ 18 ans, et je suis allé à Saint-Domingue et, de là, à New York où je me suis marié quelque temps après ; et comme j’avais été élevé pour la mer, quelques amis à moi ont équipé un petit navire d’environ 80 tonneaux, qu’ils ont confié à mes soins et à mon commandement, ayant été fait citoyen libre d’Angleterre par Sa présente Majesté dans la première année de son règne.

J’ai appareillé de New York le 15 août 1692, à destination de la Jamaïque, et j’ai été capturé le 29 par un corsaire de Saint-Malo, qui revenait de Saint-Domingue. Je suis resté deux mois à bord de son navire, après quoi j’ai été mis en prison avec d’autres marins et prisonniers de guerre. Le juge de l’Amirauté étant informé que j’étais protestant français, en donna avis au procureur du Roi, qui en ayant informé M. de Pontchartrain, reçut ordre de me persuader de changer de religion ; ou, dans le cas où je m’obstinerais, à me condamner aux galères. Cet ordre m’a été signifié, mais il a plu à Dieu de m’aider de telle manière, que je n’ai pas été effrayé le moins du monde, et je n’ai pas du tout hésité à répondre que je ne pouvais pas me conformer à leur désir, car cela allait contre ma conscience. Leurs sollicitations s’avérant vaines, je fus conduit devant la Cour pour être interrogé, et on me demanda pourquoi je n’étais pas revenu dans le Royaume, alors que le Roi avait par une Proclamation rappelé tous ses Sujets, qui étaient en pays étrangers.

Je répondis que c’était parce que l’Évangile me commandait, quand j’étais persécuté dans un Royaume, de fuir dans un autre pays. Le juge, étant probablement étranger aux maximes et aux expressions de l’Écriture, m’a dit que j’avais blasphémé ; mais lui ayant demandé de me dire en quoi, il ne voulut pas, et répéta le même mot. Je répondis que c’était une expression du Fils de Dieu contenue dans l’Evangile ; sur quoi il inclina la tête, regardant le Greffier, et répéta une fois de plus que je blasphémais. Il m’examina également sur plusieurs autres articles étrangers à mon sujet, et envoya les renseignements qu’il avait recueillis à la Cour.

Je restai quatre mois dans les Prisons de Saint-Malo, où j’eus bien des tentations à vaincre, comme des menaces et des promesses, mais par la grâce de Dieu je passais l’épreuve de tous leurs artifices. L’arrêté de la Cour étant arrivé, ma sentence fut prononcée, et je fus envoyé à Rennes, pour comparaître devant le Parlement de Bretagne. On me mit sur un cheval, pieds et poings liés, mais les secousses du cheval ayant fait gonfler mes bras, les menottes se montrèrent trop petites, et j’en ressentis alors une douleur des plus extrêmes. Un avocat du Parlement, qui parcourait le même chemin, prenant pitié de mon état, demanda à ceux qui étaient chargés de me conduire d’ôter les menottes, mais il eut beaucoup de peine à les y persuader. J’étais alors considérablement soulagé, mais il me fut impossible de tenir une plume pour écrire pendant une quinzaine de jours.

Quelques jours après mon arrivée à Rennes, je parus devant la Grand’ Chambre, et reçus l’ordre de lever la main et de jurer que j’allais répondre fidèlement et immédiatement aux questions qui me seraient posées. On me demanda d’abord mon nom et ma profession, puis pourquoi je m’étais installé dans un pays étranger, contrairement aux ordres du Roi. Je reconnais avoir alors été saisi d’une telle terreur que je pouvais à peine parler, mais on me dit de me rassurer et de répondre aux questions qui m’étaient posées. Cela m’ayant ragaillardi, je leur dis que j’avais quitté mon pays, parce que Jésus-Christ, le Roi des rois, m’avait ordonné de fuir ce pays, où je ne pouvais jouir de la liberté de conscience, et de me retirer dans un autre.

Le premier président me dit que la persécution était un grand mal ; mais ajouta que je ne devais pas ignorer que saint Paul ordonne d’obéir aux rois non seulement pour les choses temporelles, mais aussi en matière de conscience. Je répondis que saint Paul ne comprenait probablement pas ce passage dans le sens de Monseigneur ; car si c’était le cas, Monseigneur, dis-je au président, pourquoi n’a-t-il pas obéi à Néron ?

Il me demanda ensuite si j’avais tiré sur des sujets du Roi, mais comprenant que mon navire n’avait pas de canons, ni d’autres armes d’attaque, il me demanda si j’aurais tiré sur eux si j’avais été en mesure de le faire. Je répondis qu’il était naturel pour un homme de défendre sa personne et ses biens ; sur quoi il m’interrompit par ces mots, c’est un grand malheur pour vous d’être né dans cette religion, et que le Saint-Esprit ne vous ait pas éclairé, retirez-vous. Je fus renvoyé à la prison, et deux heures après le procureur général vint me dire que, si je changeais de religion, on m’accorderait le pardon, et l’on m’aiderait à trouver un bon emploi à Brest. Je lui donnai la même réponse que j’avais donnée au procureur du Roi à St Malo, à savoir, que j’étais prêt à perdre la vie, plutôt que de renoncer à ma Religion, sur quoi il s’en alla, ordonnant de me mettre à la Chaîne avec d’autre esclaves destinés aux galères.

C’est le 3 avril 1693 que je fus lié à la grande chaîne avec 59 autres esclaves, qui étaient condamnés à cet épouvantable châtiment, les uns pour désertion, les autres pour avoir fraudé les impôts royaux sur le sel, et d’autres encore, pour des crimes horribles, comme des vols avec violence, des meurtres et quatre pour viols. Il plut presque tout ce mois-là, de sorte que nous pouvions à peine parcourir 5 lieues par jour, et quand nous arrivions la nuit dans n’importe quel village ou ville pour coucher, ils nous mettaient comme des bêtes, dans des écuries, où toujours humides et sales, nous n’avions presque jamais de la paille pour coucher. Nous avions trois deniers et demi par jour pour notre nourriture, mais il arrivait souvent que nous ne trouvions pas de pain à acheter dans ces villages où nous étions obligés de coucher en route. Quand ils nous mettaient dans ces écuries, ils attachaient les deux extrémités de la chaîne aux murs, de sorte que nous ne pouvions que nous allonger, mais sans pouvoir bouger.

Cette dure fatigue et le froid de la pluie me firent attraper une violente dysenterie, et ne pouvant marcher, je donnai quarante livres à notre Capitaine pour obtenir la liberté d’être transporté dans une Charrette : bienheureux étais-je d’avoir trouvé un homme, dont la Cruauté pouvait être atténuée par de l’argent !

À mesure que nous parcourions chacune des capitales des provinces qui se trouvent entre Brest et Marseille, notre nombre augmentait rapidement, car nous prîmes plus de 60 autres esclaves à Saumur et à Angers, condamnés pour divers crimes. Nous recrutâmes aussi à Tours, Bourges et Lyon, si bien que nous étions plus de 150 hommes à notre arrivée. C’est vraiment un spectacle horrible de voir un tel nombre d’hommes attachés à une chaîne, et exposés à tant de misères, que la mort ne vaut même pas la moitié de ce supplice.

Nous arrivâmes à Marseille le 10 mai, et vers la même époque arrivèrent aussi 800 autres esclaves de plusieurs parties du royaume. Nous fûmes divisés en 40 lots, et moi et plusieurs autres fûmes envoyés à bord de La Magnanime, commandée par M. de Soisan. Il y avait à bord de cette galère six personnes condamnées à cause de leur religion, et parmi elles il y en avait trois très timorées et craintives, qui avaient quelquefois eu la faiblesse de se conformer en quelque manière aux Idolâtres de la Babylone mystique. Il plut à Dieu de m’envoyer parmi eux pour les encourager ; mon exemple et mes exhortations firent sur eux une telle impression, qu’ils résolurent de glorifier manifestement et sans déguiser le nom de leur Sauveur. L’un d’eux dit au premier lieutenant de galère, avec un courage et une résolution tout chrétienne, qu’il avait été si malheureux qu’il s’était laissé aller sous le poids de la persécution, mais qu’il demandait pardon à Dieu pour ce crime, et qu’il abhorrait l’Idolâtrie de l’Église de Rome. On lui dit devant moi qu’on allait le faire expirer sous les coups, mais il répondit que par la grâce de Dieu il était prêt à mourir. Cela suffit à attiser la fureur du capitaine de la galère contre moi, qui se plaignit que depuis mon arrivée cet homme avait cessé de faire son devoir, pour reprendre sa propre expression, car on parle ainsi de ceux qui ont la faiblesse d’aller à la messe, etc. Cela les irrita tellement contre moi, qu’ils résolurent de me traiter avec plus grande sévérité que le reste des esclaves, et me chargèrent de deux chaînes, alors que les autres n’en avaient qu’une.

Il arriva quelque temps après une autre chose, qui augmenta considérablement leur rage. Un esclave catholique romain qui était à bord de La Guerrière parce qu’il avait déserté l’armée du Roi, observant que les officiers utilisaient plus de sévérité envers M. Carrières qu’envers tout autre, et comprenant qu’il n’était là que pour avoir refusé de changer de Religion, eut la curiosité de s’enquérir auprès de lui quelle était la Religion qu’il maintenait avec tant de constance et de magnanimité. Ce fidèle confesseur lui en expliqua les principes et lui donna un Nouveau Testament traduit par le Père Amelote. J’en fus informé, et lui écrivis quelques lettres pour l’encourager à continuer l’examen de notre Religion ; à laquelle il s’appliqua avec tant de sincérité, que le jour de Pâques suivant il refusa d’adorer l’hostie ; et eut le courage de déclarer à son capitaine qu’il ne se dirait plus jamais catholique romain. Ils le chargèrent de deux chaînes et l’abusèrent avec une sévérité des plus barbares. Ils fouillèrent aussitôt ses poches, et y ayant trouvé quelques-unes de mes lettres, mes persécuteurs enragèrent contre moi, et me firent assez craindre les effets de leur fureur. Leur violence barbare ne réussit pas à forcer par la peur notre nouveau prosélyte à leur obéir ; et Dieu l’a tellement fortifié, que cela fait maintenant cinq années qu’il a été, et est encore, un très Glorieux Confesseur de son nom.

Lorsque mes ennemis virent que leurs chaînes et autres violences ne m’avaient pas impressionné, ils écrivirent à la Cour que je parlais anglais et que j’étais toujours en train d’écrire. Cette raison leur suffisait pour obtenir l’ordre de me transférer des galères dans les prisons de la citadelle de Marseille ; mais avant de parler des cruautés qu’ils ont exercées sur moi, je pense qu’il n’est peut-être pas inapproprié de donner un bref compte-rendu des difficultés auxquelles sont exposées les esclaves.

Ils sont 5 sur chaque chiourme, enchaînés avec une lourde chaîne, qui est d’environ dix ou douze pieds de long. On leur rase la tête de temps en temps, en signe de leur esclavage, et ils ne sont pas autorisés à porter des chapeaux ou des perruques, mais le Roi leur accorde tous les ans un bonnet, avec deux chemises, deux paires de caleçons du plus grossier tissu, une sorte de par-dessus d’étoffe rougeâtre, et un capuchon ; mais il faut remarquer qu’ils n’ont depuis peu qu’un manteau et un bonnet tous les deux ans, et deux paires de bas tous les ans. Ils n’ont que des haricots, et rien d’autre pour nourriture, avec environ 14 onces de pain noir par jour, et jamais une goutte de vin pendant qu’ils sont au port. Ils sont dévorés en hiver par les poux, et en été par les insectes et les puces, et forcés de coucher les uns sur les autres comme des porcs dans une porcherie. Je ne m’étendrai pas ici sur la barbarie dont usent les garde-chiourmes, cela dépasse l’imagination. Les protestants sont victimes de toutes ces misères, et de bien d’autres encore. Ils ne sont pas autorisés à recevoir de l’argent de leurs amis et relations, à moins que ce ne soit en secret ; ils sont tous les jours menacés et tourmentés par des prêtres et des frères, qui, ne pouvant les convaincre par des raisonnements, pensent que la sévérité seule peut le faire. À cela, je dois ajouter le trouble et le chagrin dont souffre une âme chrétienne à devoir vivre avec des gens malveillants et capables de tout, qui n’utilisent jamais le nom formidable de Dieu, si ce n’est pour jurer et pour insulter.

 

Le 3 mai de l’année 1694, arriva de la Cour l’ordre de me transférer dans la prison de la Citadelle, et je fus mis dans le cachot-même où M. Laubonnière un de nos plus illustres confesseurs, était mort sept mois auparavant. Je dus coucher à même les pierres, car pendant un an on ne m’accorda aucun lit, ni même de la paille pour me coucher. Il était formellement interdit à toute personne de me parler, et je n’avais le droit d’écrire à personne ; l’adjudant venait chaque nuit fouiller mes poches quand il avait fait son tour. Bien que ma condition fût aussi misérable que possible, personne n’avait pitié de moi, et les vivres qu’ils me donnaient suffisaient à peine à me maintenir en vie. Malgré tout, Dieu, dans son Amour infini, m’accordait de telles consolations, que je considérais comme peu de choses les misères auxquelles j’étais réduit. J’y restais environ un an sans voir personne ; quand à peu près à ce moment-là, le directeur de conscience du Gouverneur d’alors vint me voir, au moment où l’on m’apportait à dîner. À peine m’avait-il regardé, qu’il s’écria : Seigneur, dans quel état êtes-vous, Monsieur ! Je répondis : Monsieur, n’ayez pas pitié de moi, car si vous pouviez voir les plaisirs secrets que mon cœur éprouve, vous me croiriez trop heureux. Il me dit que les plus grandes souffrances ne donnaient pas à un homme le droit à la gloire du martyre, à moins qu’il ne soit assez heureux pour souffrir pour la vérité et la justice ; ce que je lui accordai, mais lui dis en même temps que le Saint-Esprit avait scellé cette vérité dans mon cœur, et que cette pensée même était ma consolation dans toutes mes afflictions. En prenant congé de moi, ce prêtre souhaita que Dieu voulût bien multiplier ses Grâces envers moi ; et me fit parvenir un lit de paille pour m’y coucher. Je restai 22 mois dans cette prison, sans changer jamais de vêtement, ma barbe était devenue aussi longue que mes cheveux, et mon visage aussi pâle que du plâtre. Il y avait juste au-dessous de moi un généreux Confesseur, qu’ils avaient tant tourmenté qu’il s’était retourné la cervelle, mais conservant quelques moments de lucidité, il avait toujours assez de raison pour refuser d’obtempérer à leurs désirs ; Il me demanda un matin d’une voix forte, comment j’allais. Ce fut immédiatement signalé aux gouverneurs, sur quoi je fus immédiatement transféré dans une autre prison, où je restai très peu de temps, à cause de mon chant des psaumes, alors même que je chantais à voix très basse, afin de ne déranger personne. Je fus mis le 20 mai 1696. dans une fosse souterraine, je restai jusqu’au 1er juillet suivant, quand je fus envoyé, avec la personne troublée dont j’ai parlé, par ordre exprès de la Cour, au Château d’ If, à environ cinq milles de Marseille, à l’embouchure du Port. Ils y avaient également envoyé cinq semaines auparavant cinq autres personnes de la même citadelle. Nous étions tous d’abord dans des prisons différentes, mais comme il fallait cinq Sentinelles pour nous garder, ils obtinrent de la Cour l’autorisation de nous mettre ensemble dans un lieu sûr, de sorte que le 20 août, le pauvre Monsieur dont j’ai parlé et moi-même, furent mis dans une fosse, et les trois autres dans une autre. L’endroit était ainsi disposé, que nous fûmes obligés de descendre une échelle dans un fossé sec, puis de remonter par la même échelle dans une vieille tour à travers un trou de canon. Le cachot ou la salle voûtée dans laquelle nous étions placés était aussi sombre que si aucune lumière n’avait jamais éclairé les Cieux, puante et si pleine d’immondice, que je crois vraiment qu’il n’y a pas d’endroit plus horrible au monde. Nous aurions pu recevoir de l’Argent pour nous aider dans cette grande détresse, mais ils ne le souffraient pas, de sorte que tous nos sens étaient attaqués à la fois ; la vue par l’obscurité, le goût par la faim, l’odorat par la puanteur du lieu, le toucher par les poux et les autres vermines, et l’ouïe par les horribles blasphèmes et jurons que les soldats, obligés de nous apporter des vivres, vomissaient contre Dieu et notre Sainte Religion. Les Missionnaires, qui se flattaient que nous ne pouvions résister plus longtemps, furent presque furieux, lorsqu’ils virent notre ferme résolution de mourir dans la profession de notre Religion, et se mirent donc à ne parler que des Jugements de Dieu; et là-dessus je ne pus m’empêcher de leur dire un jour que les jugements de Dieu étaient sur eux, car il leur avait permis de remplir la mesure de leurs crimes en nous insultant dans nos misères, mais que Dieu était juste et n’allait pas manquer de nous venger, et de les punir selon leurs fautes.

Après être resté 6 mois dans cette fosse, mon compagnon d’infortune étant mort, je fus transféré dans l’autre avec les 3 autres confesseurs. Comme ce pauvre homme était à l’agonie, il entendit des soldats dire qu’il fallait aller chercher l’aumônier, mais il fit un signe de la main pour manifester qu’il ne le voulait pas, et rendit ainsi son âme au Seigneur.

Nous sommes restés tous les quatre dans l’autre fosse pendant un certain temps, sans voir aucune lumière, mais ils nous donnèrent enfin la permission d’avoir une lampe pendant que nous mangions notre nourriture. L’endroit étant très humide, nos vêtements avaient pourri à cette époque ; mais il plut à Dieu d’avoir pitié de moi, misérable pécheur, et d’un autre de mes compagnons d’infortune ; car le 3 juillet, le Seigneur rompit nos fers, le très honorable comte de Portland, alors ambassadeur extraordinaire près la cour de France, nous ayant redemandés au nom de Sa Majesté. Nous laissâmes deux de nos Compagnons dans cette terrible Fosse, et environ 370 autres à bord des Galères, où ils glorifient le nom de Dieu avec un Courage et une Constance sans pareils.

Voici le récit bref mais sincère de mes souffrances, que j’ai écrit à la demande de plusieurs personnalités éminentes, comme moyen de consoler et de réjouir dans le Seigneur les Fidèles Serviteurs de Jésus-Christ, et de confondre les Émissaires de Satan, qui voudrait faire croire au monde qu’il n’y a pas de persécution en France.

Et maintenant, bénis le Seigneur, ô mon âme, et tout ce qui est en moi bénit son seul nom, et n’oublie pas ses bienfaits. J’aime le Seigneur parce qu’il a entendu ma voix et mes supplications. Parce qu’il a penché son oreille vers moi, je l’invoquerai donc aussi longtemps que je vivrai. Les tourments de la mort m’entouraient, et les douleurs de l’enfer s’emparaient de moi : je trouvais trouble et chagrin. Alors j’invoquai le nom du Seigneur; O Seigneur, je t’en supplie, délivre mon âme. Miséricordieux est le Seigneur, et juste; oui, notre Dieu est miséricordieux . Le Seigneur préserve les simples, j’ai été humilié et il m’a aidé. Retourne à ton repos, ô mon âme, car le Seigneur t’a fait du bien. Car tu as délivré mon âme de la mort, mes yeux des larmes et mes pieds de la chute. Je marcherai devant le Seigneur, dans le pays des vivants. J’ai cru, c’est pourquoi j’ai parlé : j’ai été très affligé. J’ai dit dans mon empressement, tous les hommes sont des menteurs. Que rendrai-je au Seigneur, pour tous ses bienfaits envers moi ? Je prendrai la coupe du salut et j’invoquerai le nom du Seigneur. Je rendrai mes vœux au Seigneur, maintenant en présence de tout son peuple. Précieuse aux yeux du Seigneur, est la mort de ses saints. O Seigneur, vraiment je suis ton serviteur, je suis ton serviteur, et le fils de ta servante : tu as délié mes liens. Je t’offrirai le sacrifice d’actions de grâces et j’invoquerai le nom du Seigneur. Je rendrai mes vœux au Seigneur, maintenant en présence de tout son peuple. Dans les parvis de la maison de l’Éternel, au milieu de toi, ô Jérusalem. Louez le Seigneur.

ELIAS NEAU.