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Dimanche de la Trinité / Baptême d’Abdou                                                      26 mai, 2024

Ce dimanche l’Église nous invite traditionnellement à méditer sur qui est Dieu, un Dieu à la fois un et trois. Dans la collecte que je viens de chanter, cette prière qui change chaque dimanche pour reflète le « mood » du dimanche, nous avons prié Dieu de nous aider à « reconnaître la gloire de l’éternelle Trinité et d’adorer son unité dans la puissance de sa majesté ». Une prière n’est sûrement pas de trop pour pouvoir le faire ! La formulation du mystère de la Trinité, comme on le voit dans nos crédos par exemple est le résultat du travail de théologiens qui a travers les siècles ont cherché à définir, à partir des Écritures et de l’expérience de l’Eglise et des fidèles, la manière dont notre Dieu se manifeste. Ils en sont arrivés à des formules qui en bref, nous parle d’un et un seul Dieu en trois « personnes », Père, Fils et Saint-Esprit, qui sont interdépendantes, unies dans une forme de danse. Tout ça est très bien, mesdames et messieurs les théologiens, mais qu’est-ce que ça a voir avec nous, avec les chrétiens de tous les jours, avec nos vies, nos joies et nos douleurs ? En quoi ce qui semble une théorie théologique peut nous aider à mieux aimer Dieu et nos frères et sœurs ?

C’est assez drôle que pour le dimanche de la Trinité, un concept théologique que les théologiens chrétiens ont développé, notre évangile nous montre justement un théologien qui ne pige pas grand-chose à ce que Jésus raconte.  Jésus est à Jérusalem où il s’est fait connaître avec éclat. Il vient de chasser les marchands et les changeurs du temple, et là, de nuit, un spécialiste des Écritures et de la loi qui a entendu parler de lui vient lui rendre visite. Il s’appelle Nicodème et tout ce qu’on sait sur lui c’est l’Évangile de Jean qui nous le raconte. Jésus lui dit que « personne ne peut voir le règne de Dieu s’il ne naît pas de nouveau » et Nicodème ne comprend pas car il ne peut pas imaginer qu’on puisse retourner dans le ventre de sa mère une fois adulte. Son attitude trop rationnelle, terre-à-terre l’empêche de comprendre ce mystère que Jésus tente de lui expliquer. Ca exaspère même un peu Jésus quand il lui répète : « personne ne peut entrer dans le règne de Dieu s’il ne naît pas de l’eau et de l’Esprit. » Naître de nouveau. C’est aussi pour nous un mystère, mais un mystère qui prend vie, si on ne saute pas, comme Nicodème, sur des interprétations et des conclusions toutes faites. Le mot grec que Jésus utilise pour dire « de nouveau » veut aussi dire « d’en haut ». La nouvelle naissance, la naissance d’en haut, qu’annonce Jésus, c’est celle que, comme la première, on ne peut qu’accepter, recevoir et non choisir et s’accaparer. Cette nouvelle naissance, nous la recevons du Dieu trinitaire, mais elle ne se révèle pleinement à nous qu’à travers la croix de Jésus. C’est ce que Nicodème, tant qu’il ne l’aura pas vécu lui-même, ne pourra pas comprendre.

Dieu n’est pas un concept à pénétrer, une réalité à expliquer et à expliquer aux autres, c’est une vie à vivre. Il ne s’agit pas de comprendre Dieu, mais de le vivre. Pour recevoir la vie de Dieu, du Dieu trinitaire, recevoir notre propre vie renouvelée, il faut la recevoir par cette petite porte qu’est la croix. Nicodème d’ailleurs fait finalement l’expérience de ce mystère, l’évangile nous le rapporte. Avec Joseph d’Arimathée, il reçoit « d’en haut » le corps de Jésus qui avait été élevé sur la croix. Il le prépare, l’enveloppe dans un linceul et le couche dans un tombeau. Il comprend mais plus encore il vit, que naître d’en haut, naître de nouveau, exige de faire face à la réalité de ce monde, à nos compromissions, à nos souffrances. Naître d’en haut, naître de nouveau exige de faire face à la souffrance et à la mort d’un Dieu pauvre qui n’est Dieu que parce qu’il se donne, que dans la mesure où il se donne. Naître d’en haut, c’est accepter de suivre un tel Dieu, un Dieu qui se donne.

La conversion de Nicodème, sa nouvelle naissance, c’est aussi la nôtre. Nous naissons d’en haut quand nous vivons formés sur le canevas de la vie divine, de la vie d’un Dieu un et trois, visible dans le mystère de la Croix. Et ce qui anime cette trinité, c’est l’amour, un amour pauvre. C’est un amour qui se donne sans contrôler, un amour en forme de croix, fluide comme l’eau, partagé comme le pain, versé comme le vin. Le cœur du mystère de la Trinité c’est la mort et la résurrection de Jésus car c’est là justement qu’elle est en cœur à cœur avec nous qui sommes humains comme Dieu. Au cœur de la Trinité, à cet autel, on rencontre un Dieu qui n’est pas distant, mais proche. Ici, Dieu qui se donne à nous constamment à travers nos frères et sœurs, les sacrements, la création, nos vies toutes entières.

Le baptême, comme la croix, sont des réalités visibles où se révèle l’amour du Dieu trinitaire. Dans le baptême comme sur la croix, ce n’est pas Jésus qui fait tout le travail. Ce n’est pas Dieu tout seul. C’est notre Dieu un et trois qui veut notre participation, qui se donne complètement à nous pour que nous puissions nous donner complètement à lui. Aujourd’hui, notre frère Abdou va être baptisé, au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit. Abdou, ces eaux du baptême, qui symbolisent la mort et la résurrection en Jésus Christ, tu les as déjà traversées en franchissant l’Atlantique pour venir du Sénégal jusqu’ici. Par ce rite, toute ton histoire personnelle, familiale, tout ton chemin est accueilli en Dieu. Abdou, tu m’as dit que ton prénom voulait dire « serviteur de Dieu » et aujourd’hui, alors que tu vas être baptisé, Dieu t’appelle à nouveau par ce prénom, ton prénom, lui qui te connaît depuis le ventre de ta mère. En naissant de nouveau, tu nais aussi dans une famille, l’Église. Tous les chrétiens et les chrétiennes, à travers le monde entier, tous les siècles, sont tes frères et sœurs. Tu trouveras toujours ici à St Esprit une famille pour t’accompagner et te soutenir. Ton courage, dans les difficultés et les croix est un exemple pour nous tous alors que nous allons aussi renouveler les promesses de notre baptême. Il nous rappelle que suivre le Seigneur crucifié ne peut jamais être un choix commode. Tu nous rappelles aussi, près de 400 ans après la fondation de cette petite église par des réfugiés qui fuyaient aussi leur pays à cause de leur foi, que vivre de manière authentique n’est jamais facile et bienvenu dans ce monde qui préfère l’obscurité. Merci Abdou de nous apprendre à aimer Dieu, à vivre de lui, à nous rappeler, par ta vie, par tes choix, par qui tu es simplement, le mystère d’amour qu’est la Trinité. Bienvenue chez toi.

JFAB

 

Trinity Sunday / Baptism of Abdou
May 26, 2024
Isaiah 6:1-8  Romans 8:12-18  John 3:1-17

This Sunday, the Church traditionally invites us to meditate on who God is: a God who is both one and three. In the collect I’ve just sung, (the prayer that changes every Sunday to reflect the Sunday theme), we prayed to God to help us “recognize the glory of the eternal Trinity and adore its unity in the power of its majesty”. Surely a prayer is not too much to ask! The way that the mystery of the Trinity is explained, (as seen in our creeds for example), is the result of the work of theologians who, over centuries of using the scriptures and the experience of the church and its faithful people, have sought to define the way in which our God makes himself known. They have ended up with formulas which, in short, tell us about one and only one God in three “persons”, Father, Son and Holy Spirit. These three are interdependent, and united together in a sort of dance. Ladies and gentlemen of theology, that’s all very well, but what does it have to do with us, with everyday Christians, with our lives, our joys and our sorrows? How can what seems like a theological theory help us better love God and our brothers and sisters?

It’s funny that as we remember the Trinity today – which is a theological concept developed by Christian theologians – our gospel features a theologian who doesn’t really understand what Jesus is talking about.  Jesus is in Jerusalem, where he has made a name for himself. He has just driven the merchants and money-changers out of the temple, and there, by night, a specialist in the Scriptures and the law who has heard of him comes to visit him. His name is Nicodemus, and everything we know about him is from John’s Gospel. Jesus tells him that “no one can see the reign of God unless he is born again”, and Nicodemus doesn’t understand, because he can’t imagine anyone returning to his mother’s womb as an adult. His overly rational, down-to-earth attitude prevents him from understanding the mystery Jesus is trying to explain to him. It even exasperates Jesus a little when he repeats: “No one can enter the kingdom of God unless he is born of water and the Spirit.” Born again. It’s a mystery for us too, but one that comes to life if, like Nicodemus, we don’t jump to ready-made interpretations and conclusions. The Greek word Jesus uses for “again” also means “from above”. The new birth, the birth from above that Jesus proclaims, is one that, like our first birth, we can only accept and receive, not choose and control. We receive this new birth from the Triune God, but it is only fully revealed to us through the cross of Jesus. This is what Nicodemus cannot understand until he has experienced it for himself.

God is not a concept to be penetrated, a reality to be explained and explained to others, it’s a life to be lived. It’s not a matter of understanding God, but of living him. To receive the life of God, of the Triune God, to receive our own renewed life, we must receive it through the small door of the cross. The Gospel tells us that Nicodemus finally experienced this mystery. Together with Joseph of Arimathea, he receives “from above” the body of Jesus that had been lifted up on the cross. He prepares that body, wraps it in a shroud and lays it in a tomb. He understands, but more than that, he lives the reality of what it means to be born from above, to be born again. He now knows that it requires us to face up to the reality of this world, to our compromises, to our suffering. To be born from above, to be born again, requires us to face up to the suffering and death of a poor God who is God only because he gives his entire self, and only insofar as he gives his entire self. To be born from above is to accept following such a God, a God who gives himself.

Nicodemus’ conversion, his new birth, is also ours. We are born from above when we live shaped by the pattern on the canvas of divine life, the life of a God who is one and three, visible in the mystery of the Cross. And the thing that animates this trinity is love, a poor love. It’s a love that gives itself without control, a love in the shape of a cross, flowing like water, shared like bread, poured like wine. The heart of the mystery of the Trinity is the death and resurrection of Jesus.  It is precisely there that the Trinity is at the heart of us; we who are human like God. At the heart of the Trinity, at this altar, we encounter a God who is not distant, but close. Here, God constantly gives himself to us through our brothers and sisters, the sacraments, creation, and our whole lives.

Baptism, like the cross, is a visible reality where the love of the Triune God is revealed. In baptism, as on the cross, it is not Jesus who does all the work. It’s not God alone. It’s our one-in- three God who yearns for our participation, who gives himself completely to us so that we can give ourselves completely to him. Today, our brother Abdou will be baptized in the name of the Father, the Son and the Holy Spirit. Abdou, these waters of baptism symbolize death and resurrection in Jesus Christ. You have already crossed the Atlantic to come here from Senegal. Through this rite, your whole personal and family history, your whole journey, is welcomed into God. Abdou, you told me that your first name meant “servant of God”, and today, as you are about to be baptized, God is calling you by that first name again, your first name, as He has known you since your mother’s womb. In being born again, you are also born into a family, the Church. All Christians, men and women, throughout the world and over the centuries, are your brothers and sisters. Here at St Esprit you’ll always find a family to accompany and support you. Your courage in the face of difficulties and the crosses you have had to carry is an example to us all as we renew our baptismal promises. It reminds us that following the crucified Lord can never be a convenient choice. You also remind us, almost 400 years after this little church was founded by refugees who were also fleeing their country because of their faith, that living authentically is neither easy nor welcome in this world that prefers darkness. Thank you Abdou for teaching us to love God, to live from him, to remind us, through your life, through your choices, simply by who you are, of the mystery of the love that is the Trinity. Welcome home.

JFAB