Le premier dimanche après Noël le 31 décembre 2023
Qu’est-ce que nous devons comprendre quand nous entendons aujourd’hui dans notre lecture de l’évangile que nous sommes les enfants de Dieu ? Au premier abord ça paraît être une idée assez mignonne et agréable. Est-ce que nous sommes les petits poupons attendrissants que Dieu va prendre dans ses bras ? Imaginez maintenant un bébé qui pleure dans un avion… Ce que je viens de faire s’appelle un ascenseur émotionnel… Parce que quand on y pense un peu plus, il y a beaucoup d’attributs que nous reconnaissons individuellement chez les enfants. Ils peuvent être mignons, comme ils peuvent être terrifiants selon les situations et les personnes ; d’ailleurs, pour en revenir aux bébés qui pleurent, je suis sûrement une exception, parce que, en général, quand j’entends un bébé qui pleure, ça me fait sourire. Ça peut paraître étrange et il faut que j’explique pourquoi ou vous allez penser que je suis une espèce de sadique… Vous voyez, mon père est pédiatre. Du coup, dans mon enfance et dans mon adolescence, j’ai souvent été bercé par les cris des bébés dans le cabinet de mon père ; parfois même, on les entendait déjà hurler sur le pas de la porte. Dans cette situation, je ne pouvais pas m’empêcher de sourire à l’idée que ces petits bouts de choux hurlaient et donnaient des coups de pieds dans le vent comme s’ils s’apprêtaient à faire face au pire monstre à trois têtes de l’univers. Ce qu’ils ne savaient pas, c’est qu’en réalité, ils n’avaient rien à craindre. Pire encore, ce qu’ils ne savaient pas, c’est qu’ils seraient sûrement en meilleure santé après la consultation. Ce premier attribut de l’enfance, c’est de se tromper, de commettre des erreurs motivées par la peur et l’ignorance.
Paradoxalement, un autre attribut que l’on donne aux enfants, c’est que la vérité sort toujours de leur bouche. Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais j’ai entendu beaucoup de choses sortir de la bouche des enfants, et j’espère que ce n’est pas toujours la vérité. En omettant les petites insultes et les moqueries basées sur les noms de familles dans les cours de récréation, beaucoup d’enfants mentent quand ils craignent les représailles. Heureusement, il y a des adultes, des parents, des éducateurs. C’est notre rôle de leur apprendre qu’il ne faut pas mentir. Il faut leur apprendre que parfois, ils ne le savent pas encore, mais dire la vérité peut permettre aux adultes d’agir pour régler une situation compliquée ou douloureuse. La bonne nouvelle c’est que les enfants ont tendance à assimiler les concepts qu’on leur apprend assez vite. Surtout quand il s’agit de concepts d’injustice. Imaginez à quel point il est facile de mobiliser des jeunes pour aller manifester dans la rue quand une injustice est commise contre quelqu’un. Combien d’adultes seraient capables de tout arrêter pour montrer leur réprobation publiquement quand il ne s’agit pas d’eux-mêmes ?
Quand nous pensons aux enfants encore, on imagine aussi souvent des rires. Personnellement, j’ai eu ma période où je riais de tout, même peut-être un peu trop… N’importe quelle situation devait avoir un côté humoristique. Quand j’ai eu 13 ans mon père m’avait offert un camescope, et j’étais connu pour avoir l’objectif moqueur. Ma belle-mère a dit une fois : « je ne sais pas comment il fait, mais dès qu’il pointe son objectif sur quelqu’un on a l’air ridicule et c’est hilarant. » Peut-être que ce pouvoir de rire de beaucoup de chose en tant qu’enfants est que nous savons montrer les gens tels qu’ils sont au lieu de comment ils se montrent aux autres, comment ils veulent paraître dans un monde adulte et sécularisé ; et même ici à l’église aujourd’hui, j’ai du mal à prendre certaines choses au sérieux. Ça me rappelle ma confirmation… Quand notre évêque Andy m’a confirmé il y a un peu plus d’un an, il m’a dit quelque chose que j’ai trouvé intrigant… Il m’a regardé, et il m’a dit : « maintenant tu ne peux plus faire semblant de ne pas savoir. » Je me suis demandé : « Qu’est-ce qu’il sait que je ne sais pas ? Est-ce que cela veut dire que je ne peux plus faire d’erreurs et que je dois toujours garder mon sérieux ? » Ça serait assez difficile pour moi de ne plus faire de blagues, mais en ce qui concerne les erreurs, c’est vrai que je ne crois pas qu’il y en ait beaucoup que nous fassions sans vraiment en avoir conscience. On arrive parfois à faire taire notre conscience, car ça nous arrange, mais nous savons instinctivement grâce à l’Esprit qui est descendu sur nous lors de notre baptême qu’un acte mauvais, est mauvais. Pourtant, Dieu ne nous dit pas que nous n’avons plus le droit de rire ou de commettre des erreurs, je crois que ce que notre évêque voulait me dire c’est que ce qui importe, c’est de reconnaitre nos erreurs, car nous savons, nous ne pouvons pas faire semblant. Je le répète encore, je fais partie de ceux qui pensent que l’on peut rire à l’église, malgré l’aspect parfois un peu trop guindé de nos grands édifices. Parce qu’en vrai, ne pas se prendre au sérieux, c’est un retour à l’enfance. Est-ce que vous avez déjà vu un enfant se prendre au sérieux ? En tant qu’adultes sérieux, nous avons souvent tendance à penser que la vérité sort de notre bouche, que nous avons toujours raison. Regardez le monde politique par exemple… Et je crois que vous êtes tous familier avec le concept des ‘white lies’, ces petits mensonges que nous disons pour protéger les autres (mais surtout nous-mêmes). En tant qu’enfants, on nous apprend à ne pas mentir. En tant qu’adultes on pense avoir le contrôle absolu sur nos vies donc cela ne s’applique plus à nous, alors on se permet de se mentir à soi-même et aux autres, parfois pour protéger nos biens ou l’image de suffisance que l’on cherche à projeter. Ceux qui disent de ne jamais admettre une faute ou de ne jamais s’excuser lors d’un accident par peur des ramifications légales ont perdu un peu de cette enfant en eux qui avait appris à ne pas mentir. Ils savaient mais ils ont décidé de faire semblant de ne plus savoir.
Ici à Saint-Esprit, nous sommes les enfants de Dieu. Même si parfois nous pensons que le pire va venir, que nous hurlons dès le pas de la porte en imaginant venir ce vilain pédiatre qui va nous juger et nous faire du mal en nous piquant ou pire, en nous donnant des médicaments amers, des pilules dures à avaler, n’oublions pas que les enfants de Dieu se trompent, ils commettent des erreurs. Dieu sait mieux que nous, et il va nous soigner, nous pardonner, même si nous avons peur. Aujourd’hui, alors que demain commence la nouvelle année, ensemble, en tant qu’enfants de Dieu, nous pouvons nous réconforter, nous encourager à être nous-mêmes, tout en jouant et en retrouvant en nous cet enfant rieur. Imaginez l’enfant Jésus, la Parole venue parmi nous, en train de rire. Elle est là, avec vous et moi, et vous savez, vous l’avez entendu s’exprimer, “tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit et tu aimeras ton prochain comme toi-même”. L’Esprit est descendu sur vous et vous a permis d’apprendre la Parole et de la ressentir. Dieu se propage en nous en nous faisant ressentir ce besoin de communiquer son Amour, cet Amour qui comme les enfants n’est ni sans peur, ni sans vérité franche, ni sans humour, mais surtout dans le pardon de ceux qui admettent leurs erreurs et qui ont soif de continuer à apprendre.
Enfin, pour finir, comme une de mes cousines aime dire en cette période de l’année, je vous souhaite tous un bananier !
FS
First Sunday after Christmas
December 31, 2023
What are we to understand when we hear today in our gospel reading that we are God’s children? At first glance, it sounds like a rather cute and pleasant idea. Are we the cute little cherubs that God is going to hold in his arms? Now imagine a baby crying on a plane… What I’ve just done is called an emotional elevator… Because when you think about it a bit more, there are a lot of attributes we each recognize in children. They can be cute, just as they can be terrifying, depending on the situation and the person; in fact, going back to crying babies, I’m probably an exception, because, usually, when I hear a baby crying, it makes me smile. This may sound strange, and I need to explain why, or you’ll think I’m some kind of sadist… You see, my father is a pediatrician. As a result, in my childhood and adolescence, I was often lulled to sleep by the cries of babies in my father’s practice; sometimes, you could even hear them screaming on the doorstep. In this situation, I couldn’t help but smile at the thought of these little poppets screaming and kicking at the wind as if they were about to face the worst three-headed monster in the universe. What they didn’t know was that, in reality, they had nothing to fear. To make matters worse, what they didn’t know was that they would surely be healthier after the consultation. This first attribute of childhood is to make mistakes, to make errors motivated by fear and ignorance.
Paradoxically, another attribute we give children is that the truth always comes out of their mouths. I don’t know about you, but I’ve heard a lot of things come out of children’s mouths, and I hope it’s not always the truth. Leaving out the petty insults and taunts based on surnames on the playground, many children lie when they fear retaliation. Fortunately, there are adults, parents and educators. It’s our role to teach them not to lie. We must teach them that sometimes they don’t know it yet, but telling the truth can enable adults to take action to resolve a complicated or painful situation. The good news is that children tend to assimilate the concepts we teach them fairly quickly. Especially when it comes to concepts of injustice. Imagine how easy it is to mobilize young people to take to the streets when an injustice is committed against someone. How many adults would be capable of stopping everything to publicly show their disapproval when it’s not about themselves?
When we think of children again, we also often imagine laughter. Personally, I had a period when I laughed at everything, even perhaps a little too much… Any situation had to have a humorous side. When I was 13, my father gave me a camcorder, and my lens was dreaded for its mocking edge. My stepmother once said, “I don’t know how he does it, but as soon as he points his lens at someone, we look ridiculous and it’s hilarious.” Maybe this ability to laugh at a lot of things as children is that we know how to show people as they are instead of how they show themselves to others, how they want to appear in an adult, secularized world; and even here in church today, I find it hard to take some things seriously. It reminds me of my confirmation… When our bishop Andy confirmed me a little over a year ago, he said something to me that I found intriguing… He looked at me, and said, “Now you can’t pretend you don’t know.” I wondered, “What does he know that I don’t know? Does that mean I can’t make any more mistakes and that I always have to keep a straight face?” It would be pretty hard for me to stop making jokes, but as far as mistakes are concerned, it’s true that I don’t think there are many we make without really being aware of it. We sometimes manage to silence our conscience because it suits us, but we know instinctively, thanks to the Spirit that descended upon us at our baptism, that a bad action is in fact bad. However, God is not telling us that we no longer have the right to laugh or to make mistakes. I think what our bishop was trying to tell me is that the important thing is to recognize our mistakes, because we know, and we can’t pretend we don’t. I’ll say it again, I’m one of those people who think it’s okay to laugh in church, even though our great edifices are sometimes a little too stuffy. Because the truth is, not taking yourself too seriously is a return to childhood. Have you ever seen a child take himself seriously? As serious adults, we often tend to think that the truth comes out of our mouths, that we’re always right. Look at politicians, for example… And I think you’re all familiar with the concept of ‘white lies‘, those little lies we tell to protect others (but mostly ourselves). As children, we’re taught not to lie. As adults, we think we have absolute control over our lives, so this no longer applies to us, so we allow ourselves to lie to ourselves and to others, sometimes to protect our possessions or the image of self-importance we’re trying to project. Those who say never to admit fault or to apologize in the event of an accident, for fear of the legal ramifications, have lost a little of that child in them who learned not to lie. They knew, but they decided to pretend they didn’t.
Here at Saint-Esprit, we are God’s children. Even if we sometimes think the worst is going to come, even if we scream from the doorstep as we imagine that nasty pediatrician coming to judge us and hurt us by pricking us or worse, by giving us bitter medicine, pills that are hard to swallow, let’s not forget that God’s children make mistakes, they make errors. God knows best, and he will heal us, forgive us, even if we are afraid. Today, as the New Year begins tomorrow, together as God’s children we can comfort and encourage each other to be ourselves, while playing and finding that laughing child within ourselves. Imagine the infant Jesus, the Word come among us, laughing. He’s here, with you and me, and you do know, you’ve heard him say, “You shall love the Lord your God with all your heart, with all your soul and with all your mind, and you shall love your neighbor as yourself”. The Spirit has come down upon you and has enabled you to learn and feel the Word. God propagates himself within us by making us feel the need to communicate his Love, this Love which, like children, is neither without fear, nor without frank truth, nor without humor, but above all in the forgiveness of those who admit their mistakes and are thirsty to continue learning.
Finally, as one of my cousins likes to say at this time of year, I wish you all a bananier!
(in French ‘Bananier’ means Banana Tree but it sounds like ‘Bonne année’ which means Happy New Year)
FS