Église française du Saint Esprit
Baptême d’Hortense
10 juillet 2022
Premiers pas
Cette semaine Mademoiselle Hortense ici présente nous a donné une petite leçon de vie. Elle venait juste d’arriver avec ses parents, Justine et Vincent, dans cette grande ville de New York, dans le nouvel
appartement que l’Eglise vient de récupérer dans l’immeuble d’à côté. Dans cet appartement que l’Eglise a
restauré avec soin et gentiment offert pour qu’elle y loge avec sa famille, sur un tapis tout neuf, Hortense a fait ses premiers pas. Un peu hésitante, mais décidée et joyeuse. Comme d’habitude. Encouragée par sa famille qui l’aime, elle a osé passer, en les lâchant, des mains de son papa à celles de sa maman, de celles de ses grands-parents à celles de Tonton Jo.
Vous vous rappelez peut-être aussi un jour où vous avez fait vos premiers pas ici à St. Esprit ou à New York ou encore vos premiers pas dans une nouvelle entreprise ou une nouvelle école. Peut-être vous rappelez-vous aussi les premiers pas de vos enfants ou votre premier pas avec votre partenaire. À un autre niveau, l’Indépendance américaine célébrée le 4 juillet et la Révolution française, le 14, étaient aussi des premiers pas. Elles étaient les premiers pas de nations qui, portées par un esprit de liberté et d’égalité, voulaient s’émanciper du joug des rois et de leur pouvoir autocratique, pour essayer de construire (du moins sur le papier) une
société où chaque individu serait libre, égal aux autres et comme des frères et sœurs.
La parabole du Bon Samaritain que Jésus vient de nous raconter nous aide aussi à nous lancer, à
imaginer en quoi consisterait une société plus juste et quelle serait la marche à suivre, les premiers pas à faire pour y arriver. Pour comprendre la radicalité de cette histoire, il nous faut un peu de contexte. Pour les Juifs du temps de Jésus, les Samaritains étaient un peuple à la fois proche et distant. Les Juifs étaient proches d’eux car l’Éternel avait aussi fait alliance avec les Samaritains, mais ils les considéraient aussi comme des outsiders car ils ne partageaient pas exactement les mêmes traditions et les mêmes croyances. Pour les Juifs bienpensants, particulièrement les plus religieux et les plus nationalistes, les Samaritains n’étaient pas de bons Juifs, ils s’étaient mélangés avec d’autres peuples et ne croyaient pas comme il faut ! Pourtant c’est une histoire qui fait intervenir un tel personnage que Jésus nous raconte pour nous apprendre à vivre pleinement.
D’abord, son histoire va à rebrousse poils des valeurs et des préjugés de notre monde. Alors que les Juifs qui se voient comme l’élite (un prêtre et un lévite) s’éloignent du malheureux qui vient d’être passé à tabac par des brigands, c’est quelqu’un qui est un Juif de seconde zone, un Samaritain, qui s’approche de lui et lui vient en aide. C’est lui qui fait le premier pas. C’est celui qu’on attendait le moins, le moins nationaliste et le mois religieux selon nos standards, qui nous montre ce que c’est qu’être pleinement humain, c’est-à-dire de suivre pleinement le commandement que Dieu nous donne de l’aimer et d’aimer nos prochains. Avec cette parabole et contre l’évidence, Jésus nous montre que c’est en nous approchant les uns des autres (quelles que soient notre religion, notre race ou notre nationalité) que nous nous libérons mutuellement, que nous sommes libérés et guéris. Jésus nous enseigne que c’est seulement en nous faisant proches les uns des autres, attentifs aux autres que nous pouvons vivre d’une vie pleine, authentique et libre. Une vie qui ressemble à la sienne, comme celle du Samaritain.
La vie qu’Hortense va recevoir dans le baptême, c’est la vie dans laquelle nous conduit Jésus par cette parabole. C’est la vie à laquelle nous participons tous en étant membre de cette assemblée et du mystère de la Communion, c’est la vie du Christ. Sa vie est une vie qui ne peut pas être contenue dans les limites étroites de nos identités politiques ou religieuses que, comme des bandits, nous utilisons volontiers comme des armes. La vie du Christ, comme celle du Samaritain, est une vie offerte, aventureuse, courageuse, si différente de toutes nos identités de ce monde qu’on utilise plus souvent pour nous exclure et nous manipuler plutôt que pour nous aimer vraiment, librement.
Avec ce Samaritain, Jésus nous fait comprendre que, si nous voulons aimer Dieu vraiment et aimer notre prochain vraiment, nous devons d’abord appartenir les uns aux autres avant d’appartenir à notre nation, à notre culture, à notre famille, et même à notre religion. Nous devons appartenir d’abord les uns aux autres avant de nous appartenir à nous-mêmes, de réclamer notre indépendance ou notre liberté de manière
individualiste. Nous sommes nés dans ce monde et nous sommes nés à nouveau dans le Christ pour être proche de tous, et de toute la Création, comme Dieu lui-même en est intimement proche. C’est dans l’eau qui donnent la vie à tous les êtres vivants que nous sommes baptisés. Nous sommes nés de nouveaux pour hériter de cette gloire infinie qui est d’appartenir à l’immense famille des créatures de Dieu, des saints et des anges, au ciel et sur la terre. Tout autre royaume n’est pas digne de nous.
Par le baptême nous sommes visiblement accueillis en Jésus Christ et en sa famille qu’est l’Église. Le baptême est la plus grande fête de l’Église car c’est en lui que ce corps qu’est l’Église nait aussi. Nous sommes tous conviés à nous réjouir comme d’un seul corps, à chanter comme d’une seule voix. Pendant cette fête et ce festin, l’hospitalité que nous nous donnons les uns aux autres et celle que nous recevons est l’expression directe de la gloire de Dieu dans ce monde. C’est cette gloire à l’œuvre dans le monde qui nous transforme et nous guérit, nous encourage. Elle fait naître une atmosphère de confiance, d’amitié et d’amour dans laquelle nous pouvons être nous-mêmes sans peur. Ici mêmes nos blessures les plus douloureuses comme celle de l’homme tabassé sur le chemin, peuvent être guéries par des frères et sœurs samaritains.
Si Hortense a pu faire ses premiers pas ici, ces premiers pas qui lui donneront d’être de plus en plus autonome et assurée, c’est parce qu’elle ne les a pas faits dans le vide ni toute seule. Ce sont l’amour et les encouragements, le tapis tout neuf et le bel appartement préparé par l’Église qui ont porté ses pas. Dans le sacrament du baptême Dieu n’agit pas par caprice. Un baptême n’est pas un sort jeter par le prêtre, ni un coup de tonnerre dans un ciel bleu. C’est un signe visible, communautaire, infaillible et joyeux d’un patient concours de vos vies, de vos actions et vos choix inspirés qui ont permis que l’amour de Dieu pour son peuple soit visible à tous. Chaque pas dans une vie nouvelle, (et les premiers particulièrement) est possible parce que nous nous portons les uns les autres, parce que Dieu nous apprend à marcher. Tous ces premiers pas, ceux Hortense, ceux de Justine et Vincent qui ont conduit leur fille ici, les pas du Samaritain qui s’est
approché de cet inconnu blessé le bord du chemin nous donnent du courage. Ils nous encouragent à voir que la destination de ce voyage commun que nous avons entrepris nous mène au-delà des limites de notre
culture, de notre famille, de notre paroisse, de notre nation. Notre destination c’est d’aller au-delà de nous-mêmes, vers les autres et en Dieu.
Depuis sa fondation cette petite Église, a pu se jouer de tous les pouvoirs qui nous déshumanisent quand elle se rapproche d’autre rives, quand elle fait la navette entre celles du vieux monde et du nouveau, celles du ciel et de la terre. Le baptême d’Hortense ce matin, une petite française qui a traversé l’Atlantique pour être baptisée dans cette église nous rappelle qu’elle est la vocation ultime de nos cultures humaines et encore plus de l’Église, de cette Église : nous permettre d’être proche les uns des autres, sans distinction de personnes et sans indifférence, sans nous inquiéter des différences et ni des distances. Le baptême
qu’Hortense va recevoir est un signe que Dieu nous aime et qu’il est proche de nous. L’autre rive est toute proche, car le Seigneur a ouvert un chemin dans les eaux pour nous y faire passer à pied sec.
Incarner la vie de Dieu ici, n’est pas plus compliqué que les premiers pas d’un petit enfant. Il suffit, comme celui que le Samaritain a aidé, comme Hortense, d’ouvrir ses bras et d’être prêt à se laisser rattraper si l’on tombe, d’être prêt à se laisser accueillir, d’être prêt à se laisser aimer. Alors approchons-nous, comme le Samaritain s’est approché du malheureux. Approchons-nous, comme Hortense va, dans un instant,
s’approcher des eaux de la vie. Approchons-nous tous dans la prière, dans le chant, approchons-nous car en nous approchant nous participons à la vie du Christ et à la vie du monde. Dans cette communion avec Dieu, dans une communauté accueillante, dans une famille aimante, nous avons trouvé une protection et un refuge contre tous les coups durs de la vie. Nous pouvons aussi y accueillir Hortense. À l’abri et en repos dans cette communion d’amour, accueillons-la dans la joie vraie, durable, celle dont elle sourit déjà.
JFAB
First Steps
Baptism of Hortense, July 10, 2022
This week Miss Hortense here has given us a little life lesson. She had just arrived in this big city of New York with her parents, Justine and Vincent, in the new apartment that the Church has just taken over in the building next door. In this apartment (which the Church has carefully restored and kindly offered for her and her family to stay), on a
brand-new carpet, Hortense took her first steps. A little hesitant, but determined and cheerful. As per usual.
Encouraged by her family who loves her, she dared to let go of her dad’s hands and take steps to the hands of her mom, to those of her grandparents and then to the hands of Tonton Jo.
You may also remember a day when you took your first steps here at St. Esprit or in New York, or your first steps in a new company or a new school. Maybe you also remember the first steps of your children or your first step you took with your partner. We can also think of American Independence Day on July 4th and the French Revolution celebrated on Bastille Day as first steps. They were the first steps of nations that wanted to emancipate themselves from the yoke of kings and their autocratic power, in order to try to build (at least on paper) a society where each individual would be free and equal as brothers and sisters, moved by a spirit of freedom and equality.
The parable of the Good Samaritan that Jesus has just told us also helps us to imagine what a more just society would look like, and the way forward or the first steps we can take to get there. To understand the radical nature of this story, we need a bit of context. For the Jews of Jesus’ day, the Samaritans were both a close and a distant people. The Jews were close to them because God had also made a covenant with the Samaritans, but they also considered the Samaritans as outsiders because they did not share exactly the same traditions and beliefs. For well-meaning Jews,
especially the most religious and nationalistic among them, the Samaritans were not good Jews, they were mixed with other peoples and didn’t have proper beliefs! Yet Jesus tells us a story which features such a person to teach us what our relationships with others should be like.
First of all, his story goes against the grain of the values and prejudices of our world. While the Jews who
considered themselves among the elite walk away from the unfortunate man who has just been beaten up by robbers (a priest and a Levite among them), it is someone who is a second-class Jew, a Samaritan, who approaches him and helps him. He takes the first step. It is the person we least expect, the least nationalist and the least religious by our standards who shows us what it is to be fully human; what it means to follow the command that God gives us to love him and to love our neighbors. With this parable, and against all the evidence, Christ shows us that it is by becoming close to one another (whatever our religion, race or nationality) that we mutually free each other. This is how we are liberated and heal each other. It is only by getting close to each other and being attentive to others that we can live a full, authentic and free life – a life which resembles his own; just like the Samaritan’s.
The life that Hortense will receive through baptism is the life that Jesus shows us in this parable. It is the life in which we all participate by being members of this assembly and through the mystery of Communion. It is Christ’s own life. The life of Christ is a life that can’t be contained within the narrow confines of our political or religious identities, such as the political or religious labels that like bandits we often use as weapons. Christ’s life, like the life of the
Samaritan is a life offered up, adventurous and courageous, so different from all the identities of this world that we use more often than not to exclude and manipulate others and ourselves, rather than leading us to love ourselves and each other truly and freely.
Through this Samaritan, Jesus teaches us that if we want to truly love God and our neighbor, we must first
belong to each other before belonging to our nation, our culture, our family, and even to our religion. We must belong to each other first before we belong to ourselves, or claim our independence or our freedom in a selfish way. We were born into this world and we are born again in Christ in order to be close to everyone and to all of Creation, just as God himself is intimately close to all. The water of baptism is the water that gives life to all living beings, it is in that water that we are baptized. We were born to inherit this immense glory of belonging to the vast family of God’s creatures, the saints and the angels in heaven and on earth. Any other kingdom is unworthy of us.
Through baptism we are visibly welcomed into Jesus Christ and into his family, the Church. Baptism is the greatest celebration of the Church because through this sacrament the Church’s body also comes to birth. We are all invited to rejoice as one body, to sing in one voice. During this feast, the hospitality we give to each other and
receive from each other is the direct expression of the glory of God in this world. It is this glory at work in the world that transforms us, heals us, and encourages us. It creates an atmosphere of trust, friendship and love in which we can be ourselves without fear. Here even our most painful wounds can be healed by our Samaritan brothers and sisters, just like the wounds of the man beaten up on the road.
If Hortense was able to take her first steps here, these first steps that will make her more and more
autonomous and capable, it’s because she didn’t take them in a vacuum nor alone. It was love and encouragement, the new carpet and the comfortable apartment prepared by the Church that carried her steps. In the sacrament of baptism God does not act on a whim. Baptism is not a magical act or a clap of thunder from a blue sky. It is the visible,
communal, faithful and joyful sign of a patient combination of lives, of circumstances, of inspired actions and choices made by all of you, that has allowed God’s love for his people to be visible to all. Every single step in a new life, (the first one especially) is possible because we carry each other; because God teaches us to walk. The first steps of
Hortense, of Justine and Vincent who walked their daughter into our little church, of the Samaritan who drew closer to the wounded stranger by the side of the road; all these first steps give us courage. They encourage us to see that the destination of our common journey is to go beyond the limits of our culture, our family, our parish, our nation. Our destination is to go beyond ourselves, towards others and in God.
Since its foundation, this little church has been able to frustrate all the powers that dehumanize us. The Church overcomes those powers by uniting disparate shores, by crossing between the shores of the old world and the new, by joining the shores of earth to the shores of heaven. This morning, the baptism of Hortense, a little French girl who crossed the Atlantic to be baptized in this church, reminds us of what the ultimate vocation of our human cultures and of the Church is about. This church enables us to be close to each other, without distinction of persons, without indifference, and without worrying about difference or distance. The baptism that Hortense will receive is for us a
visible sign of God’s closeness and love. The other side is very close, because the Lord has opened a way in the waters to enable us to pass through on dry ground.
To incarnate the life of God here is no more complicated than the first steps of a toddler. Just as it was for the one whom the Samaritan helped, just as it is for Hortense, it is enough to open your arms and to be ready to let yourself be helped if you fall; to be ready to let yourself be welcomed and to be ready to let yourself be loved. So let us draw close, like the Samaritan drew close to the unfortunate man. Let’s draw close to the waters of life, just like
Hortense will do in a moment. Let us all draw close together in prayer and in song. Let us draw close, because it is in drawing close to each other that we will participate in the life of Christ and in the life of the world. Thanks to our
communion with God, a welcoming community and a loving family, we have found protection against the hard knocks of life. We are able to welcome Hortense into that communion too. Sheltered and at rest in this communion of love, let us welcome her into true, lasting joy; the joy that already radiates through her smile.
JFAB