Le 5e dimanche de Pâques | Réunion annuelle le 7 mai 2023
La Bible ne contient aucune description de l’apparence physique de Jésus, et les plus vieilles représentations de lui qui ont survécu datent d’un siècle et demi après sa mort. Si nous laisse de côté le temps d’un moment le suaire de Turin et le Mandylion (l’image d’Édesse), la plus ancienne représentation de Jésus est une peinture murale romaine datant du milieu du deuxième siècle. On y voit un jeune homme imberbe au teint basané et aux cheveux noirs courts et bouclés. Il n’est pas particulièrement beau, mais ses yeux ont une qualité troublante. Chacun d’entre nous a une image particulière de Jésus dans son esprit. Elle peut être tirée d’une grande œuvre d’art, ou être le fruit de notre propre imagination. Nous n’avons pas la chance des premiers disciples qui ont vu Jésus face à face. Le fait que Dieu soit devenu visible dans la personne de Jésus par l’incarnation a libéré ces disciples et leurs successeurs de la règle du deuxième commandement, selon laquelle il était interdit de faire des images taillées ou des représentations « de ce qui est dans les cieux, sur la terre ou dans l’eau sous la terre » (Deutéronome 5:8). La vénération des icônes par les orthodoxes orientaux se fonde sur le fait que Dieu est devenu un être humain, une icône vivante, capable d’être vue, touchée et peinte. Depuis notre dernière assemblée générale annuelle, nous avons béni la magnifique icône d’Elie Neau, qui a inspiré les chrétiens bien au-delà des portes de Saint-Esprit. La manière dont cette icône a été utilisée pour nous aider à nous concentrer sur ce que Dieu fait aujourd’hui témoigne suffisamment du pouvoir de ces images saintes.
La tradition orthodoxe orientale appuie sa vénération des icônes en citant le passage de l’évangile de Jean que nous avons entendu ce matin : « Philippe lui demanda : « Seigneur, montre-nous le Père et cela nous suffira. » Jésus lui répondit : « Il y a si longtemps que je suis avec vous et tu ne me connais pas encore, Philippe ? Celui qui m’a vu a vu le Père. Comment peux-tu dire : “Montre-nous le Père” ? » (Jean 14:8-9) Nous aurions tort de penser que les auteur.es d’icônes ont créé de nombreuses versions différentes de Jésus parce qu’ils ne l’avaient pas vu face à face, alors que l’image de Jésus vue à travers les yeux des disciples était uniforme et constante. En fait, bien que les disciples aient vu Jésus face à face, ils avaient presque autant d’images de Jésus que nous et les auteur.es d’icônes en avaient. Pierre l’a reconnu comme le Messie juif, Jean l’a vu comme un ami proche, Judas a vu en lui un combattant politique pour la liberté. Les auteurs des Évangiles nous présentent également différentes « images » de Jésus. Matthieu nous présente l’aboutissement des prophètes juifs, Marc nous donne un maître divin et un faiseur de miracles, Luc nous montre un guérisseur sympathique qui se lie d’amitié avec les étrangers et les femmes, Jean raconte l’histoire de Dieu incarné et révélé dans le Christ mystique et faiseur de miracles.
Lorsque nous imaginons Jésus, nous ne voyons pas une personne, mais plusieurs : Jésus l’enfant dans la crèche, Jésus l’enseignant, le guérisseur, l’exorciste, l’activiste politique, l’ami, le crucifié ; Jésus le Seigneur ressuscité et ascensionné par qui et, à travers qui, toutes choses ont été créées. Aucune image d’un barbu à l’aise en train d’enseigner avec des enfants sur les genoux ne rendra justice à ce personnage infiniment complexe. Il semble y avoir autant d’images de Jésus qu’il n’y a de personnes qui ont vécu. Nous regardons dans le puits profond de l’histoire en essayant de découvrir qui était Jésus, et trop souvent nous n’y trouvons que notre propre visage reflété vers nous dans l’obscurité. Que devons-nous donc penser de sa déclaration à Philippe : « Celui qui m’a vu a vu le Père ? » Sommes-nous tellement occupés à façonner Jésus à notre image qu’il a cessé de nous donner des indications sur quoi que ce soit si ce n’est notre moi le plus profond ? Que disons-nous à l’homme qui, dans les années soixante-dix, a écrit un livre décrivant Jésus comme l’archétype du représentant de commerce capable de convaincre n’importe qui d’acheter n’importe quoi ?
Quel genre de Jésus voyons-nous ? Comment ce que nous voyons remet-il en question notre façon de vivre ? La question n’est pas seulement personnelle, car elle concerne l’identité de l’Église dont nous sommes tous membres. Quel genre de Jésus les gens rencontrent-ils lorsqu’ils viennent à Saint-Esprit ? La tâche de présenter Jésus au monde n’est pas le domaine privé et professionnel du prêtre de l’église. Chacun d’entre nous est appelé à être Jésus pour les autres. Il est particulièrement important de s’en souvenir aujourd’hui, lors de notre assemblée générale annuelle. Si les églises ne s’intéressent plus qu’aux programmes, aux finances et à la pertinence culturelle, nous perdrons de vue la raison même pour laquelle nous nous réunissons. Le travail le plus important que nous accomplissons ensemble est centré sur cette table, où nous nous réunissons pour partager le pain et le vin et proclamer le message intemporel : « Christ est mort, Christ est ressuscité, Christ reviendra ».
Il est vrai que les disciples et les auteurs des Évangiles sont tous d’accord sur un point. Jésus a défié et changé tous ceux qu’il a rencontrés. Il ne se satisfaisait pas du fait qu’ils ne voient que ce qu’ils avaient envie de voir. Il a appelé chacun à regarder au-delà de lui-même pour voir le Père, et à être totalement changé par cette rencontre. Nous sommes appelés à ne pas voir Jésus uniquement à travers nos propres yeux, mais finalement à nous voir nous-mêmes à travers les yeux de Jésus.
NJM
EASTER V / AGM
May 7, 2023
Acts 17:1-15 I Peter 2:1-10 John 14:1-14
There is no description of Jesus’ physical appearance in the Bible, and no images of him survive earlier than a century and a half after his death. If we lay aside for a moment the Turin Shroud and the Image of Edessa, the earliest representation of Jesus is a mid-second century Roman wall painting. It shows a young beardless man with a swarthy complexion and short curly black hair. He is not particularly handsome, though the eyes have a haunting quality. Each of us has a particular image of Jesus in our minds. It may be taken from a great work of art, or it may be the product of our own imagination. We are not as lucky as the first disciples who saw Jesus face-to-face. The fact that God became visible in the person of Jesus through the incarnation freed those disciples and their followers from the rule of the second commandment, according to which it was forbidden to make graven images or pictures of “anything that is in heaven above, or that is on the earth beneath.” (Deuteronomy 5:8) The Eastern Orthodox veneration of icons is based on the fact that God became a human being, a living icon, capable of being seen and touched and painted. Since our last Annual General Meeting, we have blessed the beautiful icon of Elie Neau, which has inspired Christians well beyond the doors of St. Esprit. The way that icon has been used to aid our focus on what God is doing today is testimony enough to the power of these holy images.
The Eastern Orthodox tradition supports their veneration of icons by quoting the passage from John’s gospel which we heard this morning: “Philip said to him, ‘Lord, show us the Father and we shall be satisfied.’ Jesus said to him, ‘Have I been with you so long, and yet you do not know me, Philip? He who has seen me has seen the Father; how can you say, ‘show us the Father’?” (John 14:8-9) Now, it would be wrong of us to assume that the icon painters painted many different versions of Jesus because they had not seen him face to face, whereas the image of Jesus seen through the eyes of the disciples was uniform and constant. In fact, though the disciples had seen Jesus face to face, they had almost as many images of Jesus as we and the icon painters do. Peter recognized him as the Jewish Messiah, John saw him as an intimate friend, Judas saw in him a political freedom fighter. The Gospel writers also present us with different ‘pictures’ of Jesus. Matthew presents us with the culmination of the Jewish Prophets, Mark gives us a divine teacher and wonder-worker, Luke shows us a sympathetic healer who befriended foreigners and women, John tells the story of God incarnate and revealed in the mystic and miracle-working Christ.
When we imagine Jesus, we see not one person, but several; Jesus the baby in the crib, Jesus the teacher, the healer, the exorcist, the political activist, the friend, the crucified; Jesus the risen and ascended Lord by whom and through whom all things were created. No image of a cozy bearded teacher with children on his knee will do justice to this endlessly complex figure. There seem to be as many pictures of Jesus as there are people who have ever lived. We look down the deep well of history, trying to find out who Jesus was, and all too often we find our own face reflected back to us through the darkness. What, then, are we to make of his statement to Philip, “He who has seen me has seen the Father”? Are we so busy making Jesus in our own image that he has ceased to be the clue to anything, apart from our innermost selves? What do we say to the man who wrote a book in the nineteen seventies depicting Jesus as the archetypal traveling salesman who could convince anyone to buy anything?
What sort of Jesus do we see? How does what we see challenge the way that we live? The question is not only a personal one, because it relates to the identity of the church of which we are all members. What sort of Jesus do people meet when they come to Saint Esprit? The task of presenting Jesus to the world is not the private and professional province of the church’s minister. Every one of us is called to be Jesus to one another. It is particularly important to remember this today, during our Annual General Meeting. If churches become all about programs, finance and cultural relevance, we will lose touch with the very reason we gather together in the first place. The most important work that we do together is centered on this table, where we meet to share the bread and the wine and proclaim the timeless message, “Christ has died, Christ is risen, Christ will come again.”
It is true that the disciples and the Gospel writers all agreed on one thing. Jesus challenged and changed everyone whom he met. He was not content that they should see only what they wanted to see. He called everyone to look beyond themselves to see the Father; and to be utterly changed by that encounter. We are being called not to see Jesus only through our own eyes, but eventually to see our own selves through the eyes of Jesus.
NJM